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Thierry Lalet : Chocolaterie Saunion, Bordeaux

A Bordeaux nous avons la chance d’avoir plusieurs chocolatiers de talent et parmi eux, Thierry Lalet, digne héritier de la Maison Saunion qui fête cette année ses 125 ans d’existence. Il a été élu en 1999 l’un des 50 meilleurs chocolatiers de France.  Moi qui ne suis pas très amateur de chocolat (oui oui, cela existe), il me le fait aimer. J’ai d’ailleurs participé récemment à un atelier chocolat/vins qu’il co animait à l’Ecole du Vin de Bordeaux et j’ai adoré. Je vous en reparlerai.

Thierry représente la 4è génération familiale. Son père qui avait une formation viticole et qui avait été directeur de plantations de caoutchouc en Indochine est tombé dans la marmite chocolat grâce à son épouse (3è génération). Plus jeune, Thierry n’envisageait pas forcément de reprendre l’entreprise, il a fait des études commerciales (BTS action co). Mais à la fin de celles-ci, il s’est dit : Pourquoi pas .

IL a d’abord suivi une formation de pâtissier avant de rejoindre l’entreprise il y a plus de 20 ans. Voici son portrait en 7 questions « péchés capitaux ».

Colère : Thierry qu’est-ce qui te met en colère ? 

Ce qui m’énerve c’est l’intolérance et les gens impatients. La chocolaterie, c’est un métier de patience.

Envie  : Y  a t-il un pâtissier que tu aurais aimé être ou que tu admires plus particulièrement ? 

Oui, Gaston Lenôtre. Il a révolutionné la pâtisserie et énormément influé sur le monde de chocolat. Il est l’équivalent en pâtisserie de Paul Bocuse en cuisine. Il a sorti la pâtisserie du labo. Il a été hyper méticuleux, précis. Pour te donner un exemple, pour lui un millefeuille ne devait pas rester plus de 30 minutes dans la vitrine d’un magasin. Sa rigueur était incroyable, et il était très en avance sur son temps. Il a formé les plus grands et il en a même fait une école. (Ecole Lenôtre). C’était en plus quelqu’un qui s’intéressait à tout, un personnage. Il s’est fait un nom, une réputation à l’international à une époque où l’on était bien loin des réseaux sociaux. C’est celui qui a amené la grandeur à la pâtisserie française.

Orgueil : De quoi es-tu le plus fier ? 

Je suis fier d’avoir réussi à reprendre l’entreprise familiale et de l’avoir faite perdurer. C’était un sacré challenge. Je ne pouvais pas vraiment faire ce que je voulais. Il y avait le regard des clients, le regard de la famille et un poids certain sur mes épaules. Alors certes, il y  avait aussi des points positifs comme une clientèle déjà existante mais je savais qu’elle allait m’attendre au tournant. Cela m’a obligé à redoubler de vigilance, à retravailler avec les équipes, à changer un peu les habitudes et à faire 2 fois plus attention.

Gourmandise : Que faut-il avoir goûté au moins une fois dans sa vie ? 

Une tarte Tatin. C’est mon dessert préféré.

Quel est pour toi le secret d’une bonne tarte Tatin ?

Il faut d’abord de bonnes pommes et puis surtout un très bon beurre, un beurre qui a du goût, qui ne soit pas qu’une texture neutre. Je ne supporte plus les tartes Tatin industrielles que l’on sert dans certains restaurants. Heureusement que d’autres continuent à en faire encore des vraies, maison.

Paresse : Est-ce qu’il t’arrive de ne rien faire ? 

De  plus en plus. J’ai appris qu’il fallait prendre du temps pour soi. Quelqu’un m’a fait remarquer récemment une chose que j’ai trouvée intéressante. Quand tu es dans un avion et qu’il y a un incident, les consignes de sécurité te disent de mettre d’abord ton masque à oxygène avant d’aider les autres. Cela m’a fait comprendre qu’il fallait aussi que je pense à moi pour aider les autres. Il faut prendre soin de soi, décrocher du boulot pour les choses importantes de la vie, la famille, les amis. Le temps passe très vite.

Avarice : Est-ce qu’être chocolatier te permet de bien gagner ta vie ? 

Ca dépend ce que tu appelles bien gagner sa vie. Je n’ai pas de collection de Porsches 🙂  Mais je vis bien. Après c’est difficile la chocolaterie, car en moyenne un artisan chocolatier réalise 50% de son chiffre d’affaires à Noël et 15 à 20 % à Pâques. La gestion est donc compliquée. En janvier l’entreprise est riche mais il faut tenir encore 11 mois. Et la gestion de trésorerie n’est pas évidente. En septembre, j’achète beaucoup de matières premières, chocolats, emballages et il faut tenir.

Luxure  : Est ce qu’être pâtissier amène un  petit truc en plus vis à vis des femmes ? 

L’image des métiers de bouche à changé en règle générale. Même s’il y  a le côté star, quand un enfant dit à ses parents qu’il voudrait être pâtissier, ceux-ci ont tendance à lui dire passe ton bac d’abord. Mais l’image est quand même bien plus positive aujourd’hui. Attention même si certains sont célèbres, ils ne sauvent pas des vies non plus. Il faut garder les pieds sur terre.

Merci Thierry.

Chocolaterie Saunion – 56 Cours Georges Clemenceau, 33 000 Bordeaux

Et sur le net

N’hésitez pas à y aller, vous vous régalerez.