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Etats d’âmes

Ne croyez pas que je me la pète, j'ai le mal de mer en Guyane

Ne croyez pas que je me la pète sur cette photo, j’ai  juste le mal de mer en Guyane. Mais couchée sur le pont, c’est tolérable © Vie de Miettes

Il y a quelques mois, je lisais un article sur le fait qu’une société ultra connectée était une société clivée et que le développement des réseaux sociaux obligeait les gens à prendre position sur tout et à s’opposer plutôt qu’à se rassembler. Plus je lisais l’article et plus je me disais, mais c’est tellement cela !  On en arrive à avoir sur Facebook des échanges parsemés de noms d’oiseaux pour des sujets aussi graves que pains au chocolats vs chocolatines.

Fou non ?

Si j’ai la chance sur le blog d’être épargnée par ce genre de propos, sur les réseaux sociaux (Facebook en l’occurrence), ce n’est pas toujours le cas. Je dois faire avec les anti viandes, les sans gluten, les anti framboises surgelées, les sans sucre, les anti-lait, les anti soja, les sans gras, les anti micro ondes, les anti….

Bref, il y a des jours où je trouve cela pénible mais en général, je gère ;).

Personnellement,  je ne suis pas anti ceci, pour cela, contre … J’avoue ne pas avoir d’avis sur tout un tas de choses. Pour avoir une opinion, je dois m’informer et pas tirer une réponse d’un chapeau. En ce qui concerne Papilles et Pupilles,  je partage mes recettes, ma façon de voir l’alimentation mais je n’oblige personne à penser comme moi. Je ne vous colle pas un pistolet sur la tempe pour vous faire manger de l’agneau ou arrêter le Nutella 🙂 Et puis j’aime aussi quand vous n’êtes pas d’accord. On discute, on échange, on partage mais on ne s’insulte pas ! Au secours quoi. Quand je vois comment les gens peuvent être violents juste pour parler de nourriture, cela me fait parfois peur.

Hormis le contenu de l’assiette, je vois ces sujets clivants dans mon boulot où souvent on oppose journalistes vs blogueurs, genre les bons contre les méchants. J’ai encore lu un article bourré de poncifs sur ce sujet récemment. Cela m’a donné envie de vous en parler pour vous raconter un peu les coulisses.

Au tout début de mon blog il y a 13 ans, les premières fois où j’ai été invitée à des présentations presse, j’étais regardée comme un OVNI. Une présentation presse, c’est quand vous êtes invitée par une marque pour découvrir un nouveau produit, un nouveau service. Il faut le faire connaître, informer les gens qu’il existe. Alors on invite ceux qui peuvent relayer cette information et toucher le public.

Je me rappelle à l’époque avoir évoqué avec Pascale la façon dont nous étions perçues. Il faut dire que comme beaucoup, je n’avais aucune expérience de ce que cela pouvait être. J’ai observé, j’ai écouté, j’ai appris et je pense à posteriori que notre arrivée a contribué à dépoussiérer le genre. Le milieu du journalisme culinaire à l’époque comptait quelques journalistes un peu « da-dames ». Nous arrivions avec nos Smartphones, nos appareils photos, nos questions certainement naïves mais toujours passionnées.

Bref, un vent nouveau soufflait.

Globalement, même si les gens ne comprenaient absolument pas ce que je faisais là, j’ai eu plutôt un bon accueil des mes collègues (oserais-je les appeler collègues) journalistes. Chacun s’est habitué à l’autre, a appris de l’autre et des amitiés se sont nouées. On avait une passion commune, cela aide. Il y avait des évènements journalistes, des évènements blogueurs, et des mixtes. Moi je suis super adaptable donc j’étais bien partout.

Et puis est arrivée la crise de la presse.

#Han

Crise de la presse ©Rawpixel Licence CC0 Pixabay

Crise de la presse ©Rawpixel Licence CC0 Pixabay

Cela a envenimé les choses avec certains (pas la majorité bien sur mais quand même, c’était perceptible). Nous étions devenues des concurrentes, gratuites. C’était de notre faute si cela ne marchait plus.  La gratuité c’est mal. 

S’en est suivi le développement des réseaux sociaux avec pour conséquence cette division, cette opposition et des articles comme le dernier en date qui dit en gros :

Nous sommes vendues, nous n’avons pas fait d’études, nous n’avons pas de culture et l’influence n’existe pas. 

Oui parce que quand on se fait payer pour créer une recette, pour un article, c’est mal. Gratuit c’est mal, payant c’est mal. On n’est pas à un paradoxe près.

Le « nous n’avons pas fait d’études et nous n’avons pas de culture » m’a fait sourire. Que de clichés et de lieux communs. En tant que blogueuse, j’écris, je photographie, je gère le SEO, les réseaux sociaux, je réponds à des centaines de commentaires et mails chaque jour, je m’occupe de ma comptabilité, de ma communication, de la pérennité de ma toute petite entreprise, je cuisine pour proposer des recettes fiables, testées et approuvées (et fais aussi les courses et la vaisselle), je pars très souvent en déplacements en France et à l’étranger, j’écris des livres de cuisine et des guides de voyage.  Je n’ai pas vraiment l’impression de n’avoir aucune culture, et avoir un Bac + 5 me sert tous les jours pour gérer cette world company ^-^. Et encore heureux que je sois payée pour cela, amis des internets. Comme je vous l’ai expliqué plusieurs fois, ceci me prend plus de 70 heures par semaine.

Quant à l’influence… je dois être au mieux un cas particulier pour avoir acheté une paire de chaussures, un livre ou un appareil photo sur les recommandations de collègues blogueurs ou instagrammeurs, ou au pire, un mouton de Panurge sans cervelle pour avoir suivi les conseils monnayés de sous-citoyennes vendues au grand capital.

Cela se voit que je suis un peu énervée ? 🙂

#Pardon.

Bref, comment peut-on écrire un article en connaissant si mal son sujet, that is the question.

Alors il est vrai que tout n’est pas rose sur les internets. Il existe des achats de followers, de likes et même ai-je appris récemment de dislikes (les gens sont fous). Il y a des abrutis blogueurs mais il y a aussi des abrutis journalistes (j’en connais ^-^). Les sujets achetés, ahahaha, ne me dites pas qu’il n’y en a pas dans la presse…  Les achats de fans aussi hein, je dis ça, je dis rien.  Et nous blogueurs avons aussi des obligations de signaler quand une publication est sponsorisée ou quand une recette est créée pour une marque. Nous ne vivons pas dans un monde sans droit, sans législation, sans obligation. Nous vivons tous au même endroit, journalistes, blogueurs, …

Au lieu de toujours tout opposer, de diviser pour mieux régner, apprenons chacun de l’autre et voyons ce qui nous rassemble. Je trouve cela beaucoup plus inspirant.

Bon week-end de Pâques !