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Interview Eric Augustine : Quand la gastronomie française s’invite à bord des avions Air France

Chaque fois que je prends l’avion, plus particulièrement un long courrier, je trouve cela absolument extraordinaire. Vous vous installez dans la carlingue, regardez quelques films, engloutissez un ou plusieurs repas et hop, quand vous descendez, bonjour le dépaysement. Le temps qu’il fallait pour faire Bordeaux -> Libourne en diligence, vous voici à Cape Town, Los Angeles ou Tokyo.

N’y a t-il pas de quoi s’émerveiller ?

Personnellement je ne m’en lasse pas, j’ai l’impression d’être un personnage d’Harry Potter saisissant un Portoloin. Oui, je sais, j’ai beaucoup d’imagination mais n’est-ce pas magique ?

Une autre chose également incroyable tient au fait que dans ces avions, on mange !

Vous me répondrez incroyable …. humph …..,  non mais t’as vu la tête des plateaux repas ???

Ce n’est pas faux, ce n’est pas toujours bon, c’est parfois même mauvais (il n’y a quelques mois, j’avais même envoyé une photo de mon plateau repas sur twitter à une compagnie aérienne nordique pour clamer mon mécontentement), mais dans la grande majorité des cas c’est quand même tout à fait correct.

Mais, si vous réfléchissez 2 secondes, vous réalisez que ces plats vous sont servis à 10 000 mètres d’altitude, dans un bolide allant à 800 km/h. C’est quand même juste dingue non ?  Imaginez-vous les problèmes techniques ? La cuisson, les fours, l’eau, le dressage …, dans un endroit qui doit faire 1 à 2 mètres carrés  ?

Rien que de penser à l’organisation, j’ai mal à la tête. 2 Doliprane SVP.

J’ai profité de mon aller retour à Tokyo la semaine dernière dans le but de découvrir les plateaux repas de la business class signés du célèbre chef français François Adamski pour interviewer Eric Augustine sur l’évolution des plateaux repas aériens. Aujourd’hui, après 40 ans de carrière chez Servair, il y est responsable recherche et développement,

Bonjour Eric, quand tu as commencé ta carrière, quelle était la priorité dans la constitution du plateau repas ?

Bonjour Anne. La priorité des priorités à cette époque, c’était la qualité des produits. On ne lésinait pas et plus particulièrement côté première ou business classe : caviar, homard, langouste, ris de veau. On ne recherchait que le meilleur.

Et avec la crise, la hausse du cours du pétrole, que s’est-il passé au début des années 80 ?

Les difficultés et la baisse des revenus ont bien entendu eu des impacts sur la qualité des plateaux repas. Beaucoup de produits ont ainsi disparu au profit du surgelé. De plus à cette époque, il faut se rappeler que les gens prenaient l’avion pour voyager avant tout. Le repas n’était vraiment qu’accessoire.

Comment la tendance s’est-elle inversée ?

C’est grâce à l’arrivée de nouvelles compagnies basées dans le golfe persique que la tendance s’est s’inversée. Poussée par la concurrence, la compagnie Air France a de nouveaux mis l’accent sur le luxe à la française notamment via la qualité de ses plateaux repas. Depuis plusieurs années, ce sont de grands chefs qui signent les menus de la business class et de la first.  Michel Roth, Régis Marcon, Anne Sophie Pic ou encore François Adamski aujourd’hui créent en collaboration avec Servair des plats mettant l’accent sur la qualité de la gastronomie française.

Combien de temps faut-il entre le début de la collaboration avec un chef et le service de ses plats à bord ?

C’est comme pour une naissance, il faut 9 mois. Les contraintes techniques sont nombreuses. Tu en avais d’ailleurs parlé dans un de tes articles que j’ai affiché dans mon bureau (youhou). Nous travaillons en collaboration constante avec le chef.

Tout cela c’est bien beau, mais côté classe économique, que se passe-t-il ?

Nous faisons aussi des efforts. Le gagnant de Top Chef 2012, Jean Imbert proposera d’ailleurs un plateau-repas à bord des vols long-courriers en cabines Economy et Premium Economy d’Air France dès le mois d’avril. Il sera composé de 3 plats : un quinoa bio, œuf poché et estragon, une blanquette d’antan revisitée et un dessert fruité inspiré de sa grande finale.

Ce repas sera disponible au départ de Paris pour 21 euros ou 7 000 Miles Flying Blue.

Très chouette ! Merci infiniment Eric et encore une fois bonne retraite à toi. C’était un réel plaisir de voyager avec toi ces dernières années. Big up !

Voilà, amis des internets, peut être la prochaine fois que vous prendrez un repas dans un avion vous penserez à cet article et vous direz que ce n’est pas si « normal » que cela de manger tout là haut. Imaginez-vous raconter cela à votre arrière grand père :p

Bon voyage !